Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Choses vues entendues sues
2 septembre 2020

La réification des relations humaines

Je rappelle le caractère éminemment subjectif de ce blog qui a entre autres pour finalité de "remplacer" très imparfaitement ce qui tend à disparaître de nos jours, la qualité des échanges et la vraie convivialité, ce qui fait qu'un être humain est heureux d'avoir un contact riche, épanoui, vrai, sincère, désintéressé avec son semblable, ce qu'on n'ose plus appeler son "prochain" d'abord parce que nous sommes dans une époque d'incroyance forte et ensuite parce que ce prochain même sans connotations spirituelles est devenu un lointain, celui qui gêne, qui dérange, qui fait peur même, en ces temps de violence, réelle ou ressentie.
Je donnerai un exemple, celui de mon frère cadet: d'évidence, il préfère un échange par sms plutôt que par la voie audio; d'abord, nous nous rencontrions une fois tous les quinze jours (tous les quinze jours; je rappelle que je n'ai que lui pour toute famille) autour d'une table (plus sympthique non?) et c'était pour parler de tout et de rien, de la vie, de sa vie, de ma mienn! puis nouvelle évolution, on ne se voit qu'après l'heure du repas pour un café à une terrasse bruyante, pour parler de ce problème de succcession, autant dire de problèmes techniques, administratifs, "froids".
Où est l'affect dans tout çà? Je l'ignore; lors de l'inhumation de ma mère, il a, comme moi, évoqué la mémoire de la disparue; j'avais l'impression d'un discours de commercial ou d'un discours de distribution des prix, mieux ou pire qu'il faisait l'éloge d'une étrangère ("l'étranger" de Camus, si prisé par les jeunes me paraît du coup prémonitoire; le personnage a tué, sa mère est morte: il reste placide, indifférent, apathique; et à son procès, il est là, comme une chose, à écouter sans écouter, à voir sans voir, tel un non-être). 

Je ne comprends pas comment on peut ainsi être à un tel degré désaffecté comme on dit d'un bâtiment qu'il l'est: sans objet, vacant, inutile; on prête aux animaux une sensibilité, et par un curieux renversement les affects de nos sociétés numérisées semblent déserter les humains et habiter les animaux ou les robots.

Moi qui fréquente les cabinets de psychaitre depuis tant d'années, j'en ai bien entendu parler à ma thérapeute.
Que de fois ce thème a été abordé; voici la réponse de la spécialiste; avec toutes mes difficultés existentielles, elle me reconnaît une certaine "santé"; de plus elle fait le même constat de l'évaporation de toute ce qui faisait la saveur des rapports humains d'autrefois; elle-même fait ce constat à propos de ses ami(e)s. Il lui faut relancer les gens ou elle tombe sur le sublime répondeur ou ils sont très occupés (on n'a jamais été autant occupés depuis qu'on a toutes les machines qui sont censées économiser le temps).

Je m'interroge très souvent sur cette mutation inquiétante qui peut conduire à la limte à cette violence gratuite dont je traite souvent; pourquoi? c'est simple, si l'autre  est une chose, un objet comme un autre, (cf le roman "les choses" de Georges Pérec, lui aussi prémonitoire), alors par un échange des signes, les choses sont dotées d'une âme et ont elles plus de valeur!
Terrible époque! et je rveiendrai une fois encore au procès Eichmann et consorts; j'ai observé attentivement le visage de cet homme moyen, ordinaire, de cet employé aux écritures comme on disait autrefois: rien que des tics un peu histrioniques, comme un remuement de vie qui reste et ce regard vide, froid, attentif à un procès qui n'était plus le sien, mais celui de personne...Les numéros tatoués sur les corps des camps étaient la première opération effectuée; pour bien signifier le processus conduisant à faire de ces êtres hagards du matériel, une masse indifférenciée utile à l'industrie; recyclage garanti...
Se pose alors la question de la définition même de l'humain; il m'arrive de pleurer à la mort d'un animal; non, je ne me poserai pas comme exemple; je ne peux être juge de moi-même.
Mais je suis terriblement inquiet; la "foule solitaire" à Tokyo, à Paris, à New-York, à Berlin, c'est la même; des pantins qui obéissent aux feux de circulation, tous ensemble, comme un seul homme: le même tout indifférencié qu'au caoeur d el'Europe il y a un peu pmus de 70 ans (c'est très peu à l'échelle de l'Histoire)
Qu'on ne me parle pas de ces marches blanches sans lendemain pour commémorer tel assassinat; un peu d'hystérie pour se contempler le nombril à plusieurs...c'est plus intense non?
Je poursuivrai par une note très légèrement optimiste; il existe encore des "survivants", indemnes de cette chosification généralisée; Midal en est un exemple et le jeune Mathieu qui m'appelle le soir alors qu'il souffre lui-même de se trouver bloqué dans son rêve de devenir acteur. Je n'oublierai pas; les autres importent plus que lui et il n'attend rien en retour...
Les gens qui sentent encore quelque chose souffrent de ce monde et dans ce monde pour moi, c'est un critère décisif. Il en reste quelques-uns, très peu (je m'efforcerai de comprendre par après ces contre-exmeples qui peuvent éclairer)
Je compte aborder plus tard le problème complexe de cette déshumanisation progressive du monde qui fait qu'on traîne un policier sur plusieurs mètres, qu'on dit à Cannes, cette ville de rêve, en plein jour: "je vais te dévisser la tête", qu'un jeune homme dans le 15ème profère: "je te donne la mort!", qu'un quidam viole une petite fille, qu'un autre agresse une femme sans défense...


Fritz Lang dans "Métropolis" ce pur chef-d'oeuvre avait fait oeuvre anticipé avec cette sensibilité des peuples d'Europe centrale dans leur meilleur; rappelez-vous cette scène d'anthologie: des "humains" tous pareils, tous interchangeables, tous au même rythme se rendant à l'usine, j'allais dire à l'abattoir. 
Auschwitz a bien été la répétition au sens du théatre de ce que je vis.

Publicité
Publicité
Commentaires
Choses vues entendues sues
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Visiteurs
Depuis la création 20 256
Publicité