Exil(s)
Une journée entière consacrée à l'exil, aujourd'hui sur France-Culture...Thème combien riche et polysémique, dramatique certes mais aussi ancien que l'histoire humaine, universel et inspirant; il a été rappelé que l'exil (l'exode) est, eu delà des faits, un puissant archétype...
Un écrivain disait que tout artiste est un exilé; de même pour un croyant, l'homme est en exil ici-bas, en attente du suprême exil.
Mais ne sommes-nous pas tous, peu ou prou, des exilés, depuis notre jour de naissance; dès ce jour de notre venue sur terre, accueillis ou non désirés, nous partageons cet arrachement du sein maternel; traumatisme de la naissance, disait fortement le psychanalyste Otta Rank...
Ce thème nous invite à penser, en creux, l'enracinement, la souche ("français de souche"), la terre et les morts, la patrie...
En ces temps de mondialisation et de nomadisme généralisé (Attali), l'exil se serait-il banalisé, mis à part le cas tragique des syriens et autres érythréens?
Mais ceux qui clament fortement l'attachement au sol ne disent-ils pas aussi une incertitude quant au lien au sol natal car pourquoi le proclamer si fort, autrement?
Mais cet exil qui fait les créateurs, qui contribue à les faire tout du moins, n'est-il pas de nature métaphysique? Ne sommes-nous pas tous des exilés, par rapport à nous-mêmes? Comme si la nature humaine n'était pas en coïncidence avec elle-même, comme en conflit interne entre une part de nous en mouvement, subi, agi ou voulu et l'autre part, statique, fixe? L'exil signe enfin les temporalités plurielles qui nous habitent, en avance, en retard, rarement synchrones; l'exil, marque de l'inachévement irréductible, signature du manque à être oui mais promesse d'un devenir et appel à changer, soi, les autres, le monde, le rapport à la terre et au temps qui passe; exil source de souffrance et, par là, puissante stimulation à la quête de ce soi, toujours à reprendre et à revivre. Revivre justement, vivre simplement...