Comment vivre?

Je me pose "la" question à plus de 70 ans alors que sur Culture on a interviewé une jeune auteure de roman autobiographique; elle a décidé de changer de vie et de quitter son entreprise pour faire du surf; l'objet de l'ouvrage est de nous conter par le menu la (re)découverte de soi que cette femme a pu vivre par la grâce du surf; sans compter la (re)découverte des éléments, de la simplicité, de l'eau du soleil, du corps; mais en définitive ce que cette femme a retrouvé comme Proust, c'est l'état d'enfance.
Du coup, je me suis interrogé et me suis demandé: "quand vit-on vraiment,librement, authentiquement, comme l'enfant que nous avons été?"

Pour ma part, je crois qu'il importe de repérer ces moments où nous nous sommes sentis "bien", à l'aise, libres, spontanés, comblés comme on dit si bien. Comblés: rien ne manque, rien ne fait "défaut" (noter au passage le génie du langage), rien n est à rechercher car tout est déjà là. Pourquoi chercher? On a trouvé.

Pour ma part, j'évoquais il y a peu mon enfance tunisoise paresseuse, indolente, rêveuse (trop), quiète (trop).
Mais il y a des moments plus vifs, plus dignes d'être vécus, où on se sent vivre en accord profond avec sa nature, où on a envie de faire un arrêt sur image!

Une image justement me revient; à la plage, je fis, ado, un saut en longueur impressionnnat; un ami m'encouragea vivement. A l'instant, je n'étais plus le garçon timoré,déjà "vieux",presque mort?

Une sensation vraie comme dit Peter Handke me parcourut; à l'exploit salué par un pair répondait ce sentiment d'exaltation; je pouvais moi aussi.

Je découvrais ce dont j'étais moi aussi capable.

Donc élément de découverte et sentiment intense d'exister pour soi et pour les autres...

D'autres moments devaient encore se produire de cet ordre dans ma vie assez rares il est vrai: le chant choral devant ces publics conquis par la beauté des grandes oeuvres St Rémy à Reims, la Madeleine avec le poignant "Requiem" de Mozart, Pleyel avec Verdi; l'écriture de mes articles ici ou là, les cours, pas tous, où l'élève manifeste sa reconnaissance, la compagnie de vrais amis (rare aussi hélas), l'assistance à des concerts mémorables (cette flûte solo dans une oeuvre de Wagner au théatre des champs-Elysées)

rien, deux-trois minutes où TOUT est dit; le temps ne joue plus; le big bang a duré une minuscule fraction de seconde et l univers entiers s'est déployé...

Ce qui donne unité à tous ces instants de grâce ( la grâce c est le don "gratuit")

Le sentiment d'être soi tout en étant hors de soi; la vérité est souvent paradoxale et défie la logique et la raison.

Et l'enfance dont a parlé l'écrivain?
Justement, elle a bien à voir avec ces moments qui donnent tout son prix à l'existence; enfants nous sommes des découvreurs des matins du monde, et l'iamgination nous fait prendre un parc pour une forêt magiqu.

Et adultes, nous rejoignons ce moi authentique que la vie sociale nous fait vite abandonner...

Ce moi vrai surgi des profondeurs méconnues de notre être, ce "moi-personne "dont parle Jung, non le personnage en représentation habituel (on est aussi en représentation seul) mais la personne, plus grande du coup que le petit moi étriqué, étouffé par habitudes et conventions...

Narcisse nous dit Midal n'est pas seulement celui qui s'aime jusqu à en mourir, c est aussi celui qui s aime pour ce qu il est réellement non ce l'image dans l'eau; il laisse couler en lui le flux du temps et de la vie. Librement.

Comments

[manouedith]

Le bonheur complet n'existe pas, seuls les instants de bonheur remplissent le coeur et donnent le bien être, comme celui-ci dimanche matin en ouvrant la fenêtre de notre chambre d'Hôtes à Talloires et en admirant la plénitude du lac d'Annecy : Je vous envoie la photo. A bientôt