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Choses vues entendues sues
3 mai 2019

Le gardien de phare

Ma vie a très tôt été marquée par les chocs du réel; j étais déjà sans le savoir sur une voie initiatique qui ne disait pas son nom tant il est vrai que la souffrance est la voie la plus rapide pour arriver à la Connaissance, celle qu on ne trouve dans aucun livre, en ne suivant aucun cours et même en ne prenant exemple sur aucun maître.

Hier retour de la psy après le jour-congé du 1er mai; j en avais des choses à lui dire de cet intolérable que je vis depuis des mois, accentué par les "vacances" (on sait que ce qui pour les uns est source de plaisirs est pour d autres source de tristesse ou d amertume).

Réception de retour chez moi de l'épais volume sur "dieux, déesses et démons"; assez cher mais après un premier enthousiasme, le soufflet est vite retombé. En matière de livres aussi "la chance" joue. Aucun critère, aucun, je le sais maintenant ne suffit à garantir la qualité d un livre. Ni le prix, ni les critiques, ni la qualité des rédacteurs, ni la 4ème de couverture.

Délicate alchimie qui se joue entre un lecteur avec ses propres attentes, elles-mêmes variables et le contenu du livre. Certes, un aréopage de grands spécialistes, un papier d excellente qualité, un index abondant et toutes le régions du monde, toutes les époques pour lesquelles on a des textes, des vestiges, ont été explorées. Le tout en caractères minuscules. C est bien mais je me suis vite dit: après tout je peux trouver çà dans mes nombreux dictionnaires et encyclopédies. Cela me fera un ouvrage synthétique qui m éviterait d investiguer dans plusieurs autres.

Mais je voulais évoquer le gardien de phare on aura compris pourquoi...sans doute?

Certes si j approche des 750 followers sur Linkedln (hier une dame italienne de grande dignité d allure, dans un français impeccable parlait de son pays comme habité par des gens qui n avaient rien en commun; je précise qu un franco-italien m avait dit à peu près la même chose. J ai répondu qu en France nous avons un chef de clan à la tête de l ancienne puissance unitaire... mais, Linkedln ou pas, je suis toujours seul et les personnes virtuelles ne sont pour moi que des ombres, comme celles qu évoquaient les grecs dans l Hadès; je suis d une autre époque; les rencontres sont incarnées ou elles ne sont pas. Je ne veux pas de fantômes; j en ai suffisamment dans la tête; justement ce sujet de la solitude m est...entêtant.

IL faudrait que je traite enfin par le menu cette solitude.

Gardien de phare ou navigateur au long cours (par exemple le vieux marin britannique Chichester et ses longues traversées de l Atlantique en furie), j y pensais ce matin. 

Encore une fois, les temps ont bien changé. Existe-t-il encore ces hommes voués au silence, à la nuit, à la solitude écrasante, de longue durée, visités de loin en loin par des pourvoyeurs de matériel et de nourritire.

Seuls face à deux infinis, le ciel et la mer, seuls comme les voyageurs du désert...Eberhardt, Foucault, Lawrence...

Je pense à tous ces explorateurs parcourant les déserts du globe au siècle dernier et il y a bien longtemps, aux Pères du désert qui ont médité sur la Mort et sur Dieu. Dans l Inde traditionnelle et encore maintenat on rencontre des hommes à moitié nus ayant renoncé à tout après avoir élevé les enfants et atteint un garnd âge, les saddhus. C est la libértion qu ils visent...de ce monde invivable. Ils espèrent atteindre à l état de "libéré-vivant".

 

Cette image des gardiens de phare m est venue de même que là les toiles de Caspar David Friedrich, le maître du Romantisme allemand en peinture, dont très tôt je me suis senti si proche: ses toiles nous montrent des hommes et parfois des couples, et surout seuls face à l infini, à l absolu, à la mort, à Dieu.
Paysages sombres, dépouillés, souvent enneigés, arbres calcinés, faible lueur de la lune, mer noir d encre, ruines d abbayes, ciels chargés d orages; homme seuls vus de dos car l essentiel ne se voit pas et l absence nous fait signe vers une Présence énigmatique.

Friedrich a magnifiquement représenté la condition humaine entre le tourment, la tourmente et le recueillement face au mystère de l Être.

On y retrouve aussi  l âme allemande dont je me sens si proche, capable du meilleur comme du pire, si profonde, si complexe, si ténébreuse que l on s'y perd à tenter de la cerner.

Aurais-je été teuton dans une vie antérieure?

Je ne sais...Gardien de phare, çà me parle comme, longtemps, m ont parlé les marginaux; moi qu ai été couvé par une mère inconsciemment possessive, je me suis senti en plein accord vaec les marges de la société, les marginaux...aussi pour d'autres raisons...trop intimes.

Cette évocation "poétique" du gardien de phare du passé (tout est semble-til automatisé et de toutes façons les phares, souvent de purs chef d oeuvre, sont remplacés par la navigation par GPS, régulé par le réseau de satellites au large du globe, me donne une sorte d'aura...

Je ne suis pas un héros, ni un superman dont se montrent si friands les jeunes de ce triste 21me siècle...

Un citadin seul n 'yant que ses livres pour le sortir du marasme, vous pensez, un vieux..

Il n y a plus d amitié au siècle des jeux vidéo et on est tant occupé (par quoi au juste?)

Les livres et ces siestes entêtantes, symptôme de ma difficulté existentielle.

Je cours me réfugier (contre qui? contre quoi?) dans ces livres; il y en a tant que je lis un passage dans l un et poursuis avec un passage dans l autre.

Mon frère dont je parle souvent malgré et à cause de la difficulté de nos relations (il est si différent de emoi et à la fois si proche), avait bien senti cette facette douloureuse de mon être.
Il y abien longtemps, pour mon anniversaire, il m avait offert le bel ouvrage biographique de Marthe Robert "Seul comme Franz Kafaka"; à l époque je n y avais pas prêté plus d attention; mais oui, il avait raison ce frère cadet, lui alors dans une forte période d'extraversion, assiégé par les femmes (je ne comprenais pas, je ne comprends toujours pas) plus esseulé maintenant.

Kafka dont une photo orne un de mes rayonnages, l'auteur-prophète de ces temps déshumanisés, le chroniqueur d une ville mystérieuse qu il détestait mais dont j ai aimé les subtils sortilèges, l éternel fiancé, l inventeur de métaphores improbables.

Parfois je me demande: qui est le plus seul, dans le fond de mon frère, très socialisé et amateur de femmes, ou de moi, objectivement et subjectivement seul.

Les Pères du désert egyptien et Pascal me font penser à Caspar David Friedrich autour de la même thématique.

Est-on seul quand on est face à Dieu, face au Vide, face à l Infini et à son propre être insondable...comme le Ciel, comme la Mer, scrutés par le gardien de phare ou C D Friedrich?

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Commentaires
S
Quand on se considère en dehors de l'océan comme séparé oui on est seul mais si on n'est qu'une des nombreuses vague qui compose cette océan on est déjà moins seul.<br /> <br /> <br /> <br /> Mais bon je comprend cette solitude qui insécurise aussi
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