Santé, maladie, Vie...
Avec mon frère hier à l epad pour rendre visite à ma mère; la météo était incroyablement belle (au fait où est passé l'hiver?); je ne m y étais pas rendu depuis pas mal de temps: nouveaux pensionnaires, forte majorité de femmes, nouveaux visages et hélas d autres disparus...
Ma mère se tenait un peu penchée, les cheveux non attachés, ce qui n était pas du meilleur effet (on sait les problèmes de personnel dans ces institutions, leur prix prohibitif et l'engraissement des actionnaires consécutif; bah, un scandale de plus dans notre système. Cette femme, très âgée, ma mère, se tourna vers nous...toujours une fraction de seconde de "reconnaissance", une sorte de perplexité puis soit un regard de colère soit un sourire...
Hier fut le jour du sourire. Mon frère qui apprécie nettement plus que moi ces visites (pour les raisons que l on devine en ce qui me concerne) lui cria son prénom et ma mère répéta "Fortunée" avec quelque chose de satisfait dans le regard puis elle articula une phrase bien construite (?) et même il y eut un petit échange à peu près cohérent; elle se mit à chantonner (ma mère aimait chanter étant jeune; elle avait en effet une très belle voix) puis on bascula dans la bouillie verbale avec ce geste typique de certains malades mentaux: elle toucha mon frère un peu comme pour se rassurer sur la réalité de leur être, à lui et à elle.
Mon frère jubilait de voir cette dame, notre mère recouvrer un court instant ses facultés d avant (elle a été une brillante élève).
De mon côté les personnes qui me suivent auront compris ma réticence à aller dans cette maison ou plutôt l extraordinaire faisceau de motivations contradictoires qui m agitent alors.
Reste le mystère d Alzheimer, contrepartie des progrès de la médecine; la nature reprend ce qu elle nous offre.
Ce que je pense reste de l'ordre de l'intution non des connaissances médicales encore que je sois un peu informé sur ce thème, un des problèmes les plus dramatiques de nos sociétés.
Je sais hélas que l'on compte quelque 50.000 syndromes différents à peu près maladies dites orphelines comprises; ce qui est "fascinant" dans ce domaine de la pathologie: les cas rarissimes; par exemple: telle maladie compte dans le monde une cinquantaine de cas. Ainsi de la maladie de l homme-arbre que j ai découverte grace à internet; imaginer un humain recouvert de branchages sur tout le corps; les cas rapportés l ont tous été en Asie à ma connaissance. Se reporter à You Tube. Mais pour moi le scandale suprême parmi tant d autres je le sais bien: les maladies san vrai remède des enfants qui me sont insupportables. Mais que pouvons-nous faire, nous les bien portants encore que pour le Docteur Knock tout bien portant est un malade quis ignore...
Pour revenir à ces maldies dites "neurodégénératives", Alzheimer qui touche en France sauf erreur 800.000 personnes (considérable en termes de santé publique, de souffrances, de charges...et de profits fabuleux pour les fonds de pension; la résidence de luxe de mon oncle, le grand médecin de la famille a coûté 10.000 €/ mois, certes près du Parc Monceau...).
A considérer ma mère (je me garderai de génraliser: chacun d'entre nous a un manière qui lui est propre de manifester telle maladie), il semble que son psychisme passe par des sortes de cycles: moments de lucidité puis retombées; tout se passe comme si la mémoire des jours anciens était quelque part, loin, très loin et se remettait à fonctionner puis basculait dans une sorte de brouillard de la conscience...Avec ces stéréotypies étranges, cette marmelade de mon mots, ces accès de colère soudains, ces oscillations de l humeur, qui je le répète font penser aux maladies mentales les plus graves (je pense à cet agrippement dont je parlais tout à l'heure). Un fait m a beaucoup frappé: l impact de l investissemnt affectif sur ces brèves réminiscences; elle n'a hélas aucune réaction au prénom Henry, celui de mon père. Très significatif.
Enfin reconnaît-elle ses deux enfants; mystère encore; hier désignant mon frère elle l a pris pour...son mari. A rapprocher de l "oubli" par elle de ce dernier.
Les psychanalystes parlent de cryptes cette fois au sujet des humains "normaux"; ces cryptes renferment de lourds secrets pour faire vite; elles nous protègent.
Aidons la recherche médicale autant que possible. Il est noble et simplement humain de participer à l'effort médical.
Pour tous pas seulement pour nos frères humains en détresse.
On me pardonnera le côté froidement clinique de mes descriptions; que l on comprenne que c est pour moi une manière de me protéger d affects douloureux et chargés d'ambivalence; chacun se protège à sa manière du Réel comme dit Lacan.
De plus mes études m ont une peu formaté et ne pas oublier le bain médical dans lequel j'ai baigné dans mon enfance...
Je pense revenir sur une réflexion plus approfondie sur la santé et la maladie au plan philosophique; une théorie actuelle, très en vogue aborde les maladies sous l angle darwinien; la nature sélectionnerait des comportements autrefois utiles à la survie mais inadaptés maintenant à l environnement.
Des traits subsistent dans nos comportements des ères très anciennes; ils demeurent comme des ruines d'une très vieille abbaye (je pense à la France) environné d édifices modernes...
Anatomiquement il est intéressant d observer des structures "inutiles"... encore et plus finement la génétique nous enseigne aussi la "survie" de matériel génétique inentamé, semble-t-il à côté de gènes mutant encore.
Je terminerai par cette belle observation de ce génie, Freud, quoi qu'on en pense; dans un écrit peu connu il compare certains aspects de la psyché humaine à la végétation du Jurassique qui serait encore subsistante; j'aime beaucoup ce côté visionnaire du Maître de Vienne; n oublions pas qu il fut un très grand neurologue dans un premier temps, un exceptionnel clinicien, un humaniste épris de culture classique, un amateur d archéologie.
Ce très grand savant dont je trouve les concepts toujours opératoires dans ma propre interprétation de nos conduites a été nourri par deux magnifiques représentants de l école psychiatrique française, Charcot, le parisien qui drainait les gens du monde à ses présentations de malades à la Salpêtrière, passionné par l'étude de l'hystérie, "en vogue" à son époque et Bernheim, le grand professeur de Nancy.
Pour la petite histoire, Freud n a pas aimé Paris mais la rencontre avec Charcot l a marqué à jamais.
A travers ce billet une sorte de "passion" pour la médecine me saisit.
J ai eu cette chance de rencontrer de très grands médecins; le souvenir du Professeur Denicker, "inventeur", avec Laborit de la chlopromazine pour traiter les psychoses (cette découverte devait provoquer une révolution puisque enfin on disposait d une molécule efficace) me hante encore; dans des circonstances dramatiques pour moi et grâce à mon propre oncle, lui-même inventeur d'un traitement des maladies tropicales: le bel appartement-cabinet de ce maître; son bureau grand comme un appartement avec les milliers de livres sur les étagères. Le Professeur Denicker m avait dirigé vers le Docteur André Haim, un médecin profondément humain dont le regard chargé de bonté me revient en mémoire...
Pour revenir à notre actualité et en lien avec ce qui précède chacun d entre nous abrite des archaïsmes d ordre somatique et d ordre psychique.
Grandeur et fragilité de l Homme...