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Choses vues entendues sues
6 juin 2018

Un baume au coeur

Morosité, interrogation sur mes défaillances (heure de rendez-vous avancée par erreur de ma part), météo sinistre, ras-le-bol général, inflammation naissante à l oeil droit, tout cela a "disparu" comme par enchantement par la grâce de mes cours...

En début d'après-midi, chez mon élève de Bagneux à quelques encablures de la résidence pour personnes très âgées où loge ma mère (!).
Élève peu bavarde, ce qui est curieux pour une littéraire et dont je sentais confusément chez elle une "pression", ce qui a fait que j accélérais, croyant à une demande muette de sa part. En fin de séance, la mère devait me parler, cette femme française convertie (au fait, il serait intéressant de faire cette statistique: combien de français convertis à l Islam en France?) cette fois vêtue de noir de la tête aux pieds (ce noir de la mort pour notre culture, de moins en moins il est vrai, puisque TOUT change et ce noir du chiisme, bien loin de l Islam "tranquille" de ma Tunisie natale sunnite et encore plus, d une certain Islam hédoniste de la vieille Perse). Entretien il est vrai détendu avec de la part d cette femme de l ironie marquée de bienveillance à mon endroit (lui plairais-je?).
J avoue que ce déplacement en banlieue ne m agrée pas particulièrement mais çà m occupe et je découvre des milieux de l intérieur; ainsi je suis frappé par la sociabilité des familles musulmanes; il y a toujours des invités chez elles; çà nous change de l hyperindividualisme à la française).

Ensuite cours chez un élève de milieu bourgeois catholique ouvert, fréquentant le prestigieux Lycée Buffon. Elève ici encore passif qui attend ma parole comme le nouvel Evangile, c est le cas de le dire. Comme à l habitude j improvise; je trouve cette pratique plus vivante et plus "risquée" (un peu d aventure dans un monde de plus en plus balisé et terne).
Surprise pour moi: m attendait un texte:une des Lettres philosophiques ou anglaises de Voltaire, que je n aime pas beaucoup par sa personnalité mais qui incarne bien des composantes de l esprit français; le goût du persiflage, la causticité, la vivacité...
Cette 3me lettre, assez brève, portait sur l aventure de George Fox, le "jeune " fondateur du mouvement quelque peu "revivalist" des Quakers.

Ce texte d une grande densité sémantique est du meilleur Voltaire. On y retrouve l allant de "Candide", la finesse de l analyse, à travers la figure du prédicateur qui souhaitait revenir aux premiers temps du christianisme; Fox nous est présenté comme un rebelle bafouant avec courage les usages et les formalismes de la société de son temps.

J y ai vu une secrète admiration affinitaire de Voltaire pour ce marginal, cet "hérétique", anticonformiste et soucieux de retrouver les sources vives du christianisme à l époque de sa création: un secte alors, et de faire revivre l effervescence des origines à l imitation de Jésus Christn après tout, lui aussi, un hors la loi et un révolutionnaire, qui ne respectait pas grand chose des moeurs du temps. Ce texte m a inspiré et malgré sa brièveté j ai pu le commenter une heure et demi durant, apportant à mon élève, très cultivé, des informations sur les Quakers, la personnalité extraordinaire de Fox, sa haine de l établissement catholique et de ses institutions figées (je rappelle que le théologien allemand Drewwermann avait écrit en son temps un ouvrage sur "les fonctionnaires de Dieu" ce qui désignait le clergé!)

Curieux que ce déiste de Voltaire qui, ne l oublions pas, à frappé, peu avant sa mort à 83 ans, à la porte du Temple (je veux dire s est fait initier à la célèbre Loge dite "des neuf soeurs" à Paris) ait ainsi rédigé un vibrant plaidoyer en faveur d un outsider du protestantisme.

Pas si curieux en fait. Le grand Voltaire s'est toujours fait le défenseur acharné des rebelles et des hommes libres; en cela ce grand anglophile et admirateur du parlementarisme , à l instar de Montesquieu, incarne l esprit français dans son meilleur et le siècle des Lumières, dont il ne reste plus hélas (j en profite pour rendre hommage à ce collègue de Lettres pour ses choix de textes qui résonnnent par contraste avec ce temps de néo-conservatisme) de nos jours que des traces dans des manuels de français...

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